Fondée dans le courant de l’année 1912, la Société des experts chimistes de France est une association à but non-lucratif relevant de la loi du 1er juillet 1901. Reconnue très tôt d’utilité publique, son objectif premier était de surveiller la qualité des produits et biens de consommation mis sur le marché afin de s’assurer de leur conformité à l'égard des réglementations, des méthodes de mesure ainsi que des normes en vigueur. Le Bulletin international de la répression des fraudes qui avait été créé en novembre 1908 afin de répondre à un besoin croissant en documentation de la part des commerçants et des experts devient en 1912, avec les Annales de falsification, l’organe de communication officiel de la Société des experts chimistes. Fruit d’une coopération scientifique à la fois nationale et internationale, le Bulletin permet ainsi une harmonisation des pratiques existantes en renseignant le lecteur sur l’évolution de la législation.
Les 84 numéros, parus de novembre 1908 à décembre 1916, agissent en tant que supplément des Annales de falsification en présentant le volet légal de la répression des fraudes à la fois en France et dans le reste du monde. S’y trouvent présentés des textes de loi nouvellement promulgués, des décisions de justice sur des affaires instruites en France pouvant faire jurisprudence ainsi qu’un historique complet des fraudes relevées et sanctionnées sur le terrain. Et afin d’être toujours à la pointe dans ce domaine, le périodique s’appuie sur un réseau français de scientifiques et de législateurs tout en échangeant régulièrement avec les correspondants étrangers de la Société. A partir de l’année 1917, les Annales de falsification absorbent le Bulletin de la répression des fraudes et ses thématiques pour ne plus former qu’un seul et même périodique.
La vigne et le vin occupent une place importante dans la publication, bon nombre d’articles leur sont dédiés. L’élaboration du produit fini concentre une grande partie de l’attention des pouvoirs publics : surplâtrage, mouillage, sulfitage abusif, addition d’un alcool étranger, vente de vins piqués, constituent autant de cas d’infraction à la loi que le Bulletin s’attache à mettre en lumière. Cela étant, l’origine du produit importe autant que sa composition, et dans cet ordre d’idée, la législation devient de plus en plus punitive vis-à-vis des fraudeurs qui tentent de s’approprier une appellation géographique alors qu’ils n’en ont pas le droit. De 1908 à 1912, bordeaux, champagnes ou encore cognacs, voient leurs aires de production se préciser sous l’impulsion des producteurs qui désirent préserver leurs vins en les mettant à l’abri de toute baisse de qualité ou autre tromperie sur la marchandise, préfigurant ainsi l’élaboration, d'une part, des premières « Appellations d’Origine » dans les années 1920 - 1930 et d'autre part, des Appellations d'Origine Contrôlées quelques années plus tard (1935). Autant de batailles politiques et judiciaires dont le périodique se fait le portevoix.
Ainsi, le Bulletin représente une formidable source d’informations sur cette époque charnière pour la viticulture française en réunissant un grand nombre de données, à la fois en France et dans ses colonies